Inauguré en 1969, le Palais vient de fêter ses 50 ans. Depuis sa création, toutes les municipalités ont eu des projets d’agrandissement, d’extension et de rénovation. Deux visions s’affrontent pour ces élections municipales. La liste Notre Parti c’est Megève propose de réinjecter 12 millions d’€ pour intervertir le gymnase et la salle des congrès. La liste Nous Megève table plutôt sur une optimisation de l’existant.
Les chiffres, rien que les chiffres
3 millions € de frais de fonctionnement.
3,3 millions € de frais de personnel.
2,3 millions € de recettes (les documents mis à disposition de la mairie ne donnent pas les chiffres par espace, il faudra donc nous contenter de cette valeur globale).
Facture d’énergie : + 1 million € par an.
5 millions € de déficit / an.
25,6 millions € de dette (plus de la moitié de la dette communale).
12 millions € : Estimation du coût des travaux de l’espace congrès (financé avec le fruit de la vente du terrain des Veriaz).
Qui a creusé le déficit du Palais ?
Principal point d’achoppement : le coût annuel du Palais. La municipalité a voté le versement d’une subvention de 5,6 millions d’€ lors du Conseil municipal de février 2020 pour maintenir la structure à flot.
Les élus de la majorité ont aussi reproché à Sylviane Grosset Janin, maire de 2008 à 2014, d’avoir signé pour 45 millions d’€ de travaux pour le Palais à quelques mois de la fin de son mandat. (Voir page 128).
Or, cette dernière ne s’était engagée, avec les élus de l’époque, que sur une première tranche ferme de travaux de 16 millions d’€ HT… L’ensemble du projet, avec 6 autres tranches conditionnelles, était estimé à 28 millions d’€ HT plus la rémunération du maître d’ouvrage à hauteur de 4 millions d’€. Ces tranches pouvaient “être ou non affermies, indépendamment les unes des autres au choix de la collectivité.“
Nous vous mettons en lien le Conseil municipal d’avril 2013 (page 58 et suivantes) pour le vérifier et celui de novembre 2013. Ces derniers ne sont plus sur le site internet de la mairie mais nous avons pu les retrouver.
Le 24 juin 2014, l’équipe de Catherine Jullien Brèches décide de débloquer des tranches conditionnelles : création d’une salle d’escalade, d’un squash, d’un golf indoor et rénovation de la salle des congrès. Le budget global ne devant alors pas dépasser 26 millions d’€ HT.
Le compte-rendu de ce Conseil municipal ne figure qu’en version audio sur le site internet de la mairie : écoutez celui du 24 juin 2014 entre 1h05 et 1h30.
Les coûts du chantier vont exploser dans les mois suivants, et le projet sera revu à de nombreuses reprises (à ce jour la salle des congrès n’a toujours pas été rénovée). De nombreux avenants aux marchés publics seront débattus en Conseil municipal jusqu’à la livraison de l’extension et des nouveaux espaces en 2016.
Les deux dernières municipalités sont donc toutes les deux responsables du dérapage budgétaire du projet Palais et de la dette colossale estimée, fin 2019, à un peu moins de 26 millions d’€.
Travaux urgents ?
Faut-il absolument réinvestir 12 millions d’€ dans le Palais ? Notre Parti c’est Megève veut se doter d’un outil pour accueillir des séminaires et des congrès. Mais d’autres travaux sont peut-être plus urgents dans la commune et mériteraient également l’emploi de la somme issue de la vente du terrain des Veriaz.
Les parkings souterrains sont minés par des infiltrations, ce qui met en péril leur structure. Le toit de la mairie ainsi que ses balcons sont en fin de vie et de nombreux immeubles de logements mériteraient d’être rénovés.
Au Palais, le toit de la patinoire, par exemple, n’a quasiment pas été rénové depuis sa construction il y a 50 ans. L’isolation globale du bâtiment est catastrophique, ce qui engendre de nombreux coûts, notamment en matière de chauffage ou de climatisation.
Lors de la dernière tranche de rénovation et d’agrandissement, la turbine hydro-électrique qui permettait au bâtiment d’auto-produire une partie de sa consommation d’électricité, a été stoppée en 2015. L’engin, faute de fonctionner, s’est considérablement détérioré. Mais face à l’explosion de la facture (+15 % environ), il a finalement été décidé de la remettre en route. Les travaux pour la remise en état ont coûté cher. Elle tourne aujourd’hui à nouveau.
Double peine, c’est également l’eau de la turbine qui permettait de rafraîchir la médiathèque. Lorsqu’elle était arrêtée, environ 80 m3 d’eau potable par jour, soit près de la moitié de la consommation du Palais, étaient gaspillés pour refroidir cette aile inaugurée en 2003.
Le mur d’escalade, bien que flambant neuf, n’est pas aux normes pour accueillir des compétitions internationales. Il lui manquerait environ 50 cm et des gradins pour le public. Ce qui est dramatique pour la promotion de l’espace et du Palais tout entier.
Enfin, concernant le pôle aquatique, la piscine intérieure et le bassin olympique sont chauffés par la machine qui fabrique la glace de la patinoire. En hiver, l’excès de chaleur est rejeté dans la piscine extérieure, qui du coup ne descend pas sous la barre des 8 à 9 °C. Une température trop élevée pour organiser des compétitions en eau froide, pourtant de plus en plus populaires. Et pendant ce temps, le bassin de balnéothérapie et le SPA, juste à côté, sont chauffés au gaz !
Bref, s’il y a des travaux à faire au Palais, ceux destinés à faire diminuer les frais de fonctionnement ne seraient-ils pas prioritaires ?
Le défi de la commercialisation
Le Palais ne sera-t-il jamais qu’un gouffre sans fond où pourrait-il un jour devenir rentable ?
Le premier frein à sa rentabilité est sa structure administrative : un SPIC, Service Public Industriel et Commercial. Les employés sont des fonctionnaires territoriaux, avec des règles de recrutement et de mobilisation, ainsi que des grilles salaires bien particulières. De plus, chaque tarif de chaque espace doit être voté en Conseil municipal, ce qui rend la création de billets groupés avec des partenaires (les remontées mécaniques, les hôtels etc.) extrêmement difficile, puisque chaque initiative en la matière doit être validée en délibération.
Une lourdeur administrative qui empêche la mise en place d’actions de promotions spontanées, et de recourir au “pricing” dynamique, en gros, de faire des tarifs période pleine / période creuse comme EDF ou le secteur de l’hôtellerie. Transformer le SPIC en SEM, Société d’Économie Mixte, serait sans doute plus favorable à la mise en place d’une véritable stratégie de commercialisation.
Second frein : le Palais est-il un outil de service public où est-il une structure qui doit être rentable ? Il faudra régler une bonne fois pour toute cette question. Il est parfois dur de conjuguer la mise en place d’événements et de séminaires avec les usagers habituels du Palais, qui souvent le considèrent comme une extension de leur propre structure, comme le Club des Sports, les écoles, etc.
Troisième frein : l’absence de service commercialisation. Aucune personne ne gérait à plein temps, jusqu’à la fin de l’année dernière, la commercialisation du Palais. Comment voulez-vous alors faire venir des clients ? Lors de la présentation du projet de restructuration aux élus en avril 2013, Pascal Sirop, le directeur de l’époque, tablait sur une fréquentation de 8 000 personnes par jour au pôle aquatique en été. On est aujourd’hui très très loin du compte.
Le service commercialisation de l’Office de Tourisme, qui organise de nombreux séminaires avec des entreprises privées, tente de mettre en valeur les espaces du Palais dans ses offres. Mais elle se heurte à l’organisation interne qui a tendance à privilégier les usagers historiques, lesquels ne sont pas forcément les plus rentables.
Espérons que la future équipe sache mettre tout le monde autour de la table pour stopper cet hémorragie financière. Il faudra trouver des synergies intercommunales, des partenaires et surtout mettre en place un vrai plan d’attaque pour faire augmenter les recettes. Un dernier chiffre : chaque année, le Palais perd entre 5 et 6 millions d’€, c’est l’équivalent du budget de la commune de Praz sur Arly.
Le Palais, quelques dates
1964 : Début du chantier.
1967 : Ouverture de la patinoire.
1968 : Ouverture de la piscine intérieure.
1970 à 1978 : Création de 10 cours de tennis.
1972 : Inauguration de la salle des congrès.
1981 : Ouverture du bassin olympique extérieur.
1984 : Inauguration du gymnase et du tennis couvert.
2003 : Une extension accueille la médiathèque et un auditorium.
2013 : Ouverture du Spa.
2016 : Ouverture de la balnéothérapie, de la salle d’escalade et du nouvel espace fitness.
2019 : Rénovation partielle de la salle des congrès (sol et rideaux).
Voilà, nous savez désormais la vérité sur le Palais, du moins, ce que nous avons pu vérifier ! Merci d’avoir lu jusque-là et merci aux nombreuses personnes qui m’ont apporté des éléments 😉