Bisons dans la neige
Bisons dans la Neige © Pixabay

Aucun événement n’aura généré autant d’émotions, ces dernières années à Megève, que l’abattage des bisons du Domaine de la Sasse le 19 juillet 2019. Emballement médiatique, bad buzz sur les réseaux sociaux, communication politique désastreuse… Le coût, en terme d’image, se chiffre à plusieurs millions d’euros. Décryptage. 

Emballement médiatique

Le 19 juillet 2019, une troupe de tireurs d’élite abat 19 bisons au sommet du téléski des Étudiants sur le domaine skiable de Megève. 
Les bêtes, échappées depuis le mercredi 17 juillet, représentaient, aux dires des autorités, un risque pour la population. L’Agence France Presse émet une première dépêche le 18 juillet au soir. Dépêche reprise par les plus grands médias nationaux. Puis la nouvelle de l’abattage fait le tour du web : Europe 1, le Figaro, BFM TV, Swissinfo… Générant, d’après notre analyse (avec l’outil Cision), entre 1 et 1,5 millions d’euros d’exposition négative. 

Capture ecran recherche bison Massacre des bisons : le coût d’un bad buzz
Capture Ecran ©DR

Dominique Muffat-Méridol et son troupeau étaient devenus, au fil des années, les chouchous des médias. En 25 ans d’existence, le Domaine de la Sasse a généré quantités d’articles et de reportages dans la presse nationale et internationale. Une histoire aussi populaire que la création du fuseau par la maison AAllard, ou l’arrivée de Noémie de Rothschild à Megève en 1920.
Les bisons disparus, ce sont autant de futurs articles de presse perdus pour Megève… Et le manque à gagner se chiffre, là encore, à plusieurs centaines de milliers d’euros d’équivalent publicitaire. 

Tornade sur les réseaux sociaux 

Sur Facebook, la nouvelle de l’abattage commence à se propager dès le 18 juillet, notamment via la diffusion d’un communiqué de restriction de circulation publié sur la page officielle de la Mairie de Megève. La colère gronde, les commentaires commencent à affluer mais sont rapidement censurés par le service communication de la commune. De toutes façons, il est trop tard pour qu’une action collective puisse s’organiser afin de tenter un rabattage du troupeau.

Le 23 juillet, Adrien Duvillard publie un témoignage bouleversant sur les dernières heures des animaux : Je suis Bison de la SasseTémoignage partagé plus de 3700 fois et commenté plus de 3000 fois.

Capture d’écran ADuvillard Massacre des bisons : le coût d’un bad buzz
Capture écran post Facebook A. Duvillard ©DR

La page Bisons de la Sasse, pour une cause universelle, créée par la famille Muffat-Méridol, rassemble aujourd’hui plus de 3500 personnes. La publicité négative continue pour Megève, certains appelant même au boycott de la destination. Évaluer l’impact de ces multiples commentaires est très complexe : ils varient entre 200 000 et 1 million d’euros selon les outils utilisés (Cision / Meltwater).

Silence radio à la mairie

En juillet, les élus mègevans, eux, optent pour la politique de l’autruche. Publication laconique d’un arrêté de circulation pour vider la zone en vue de l’opération d’abattage le 18 juillet au soir, puis diffusion d’un communiqué de presse, le 19 juillet, après la tuerie. Communiqué dans lequel le Maire, Catherine Jullien Brèches, s’exprime à la première personne, et non pas au nom du Conseil Municipal (normal, puisqu’elle n’a pas pris la peine de le consulter). Elle rejette la responsabilité de la tuerie sur la Préfecture de Haute-Savoie. 

Lors du Conseil Municipal du 23 juillet, deux conseillères d’opposition,  Marie-Christine Ansanay-Alex et de Sylviane Grosset Janin, prennent la parole.
Pourquoi le maire n’a-t-il pas utilisé son droit de police ? Pourquoi tous les élus n’ont pas été prévenus, pourquoi n’ont-ils pas été conviés à la cellule de crise ? Quelle est la stratégie de communication en cas de crise ? Quel soutien sera apporté à M. Muffat Méridol ? Aucune réponse n’a été apportée à leurs questions.

Les élus perdent patience, se justifient maladroitement. L’un d’eux clame qu’au moment des tirs les bisons se trouvaient sur la commune de Saint-Gervais ! Des réponses vagues et désorganisées qui ne font qu’accentuer la défiance des habitants envers leurs élus locaux. Le coût politique de ce manque de communication est ici impossible à chiffrer.

Vous pouvez écouter la séance en replay ici, dans la version audio du Conseil Municipal. Cliquer sur le conseil du 23 juillet.

Le 10 février 2020, après 7 mois de silence, Catherine Jullien Brèches reparle des bisons sur le site internet Megève People, déchaînant une nouvelle tempête médiatique. Elle clame qu’elle n’avait aucun pouvoir pour éviter la tragédie. Cette récupération politique contestable, à un mois du premier tour des élections municipales, n’est pas du goût de la famille Muffat Méridol, qui rétorque qu’elle n’a, au contraire, rien fait pour éviter le pire.

Un symbole assassiné

Reste pour les mègevans et les inconditionnels de Megève, un furieux goût d’injustice et d’inachevé. Pourquoi n’ont-ils été prévenus que si tardivement ? Pourquoi ne leur a-t-on pas donné l’opportunité de se mobiliser pour sauver le troupeau ? D’après Dominique Muffat-Méridol, 30 personnes maximum auraient suffit pour canaliser les bêtes et les inciter à retourner vers la Sasse.
Car si la chèvre est l’animal officiel qui figure sur le blason du village, on pourrait presque dire que le bison l’avait remplacé ces dernières années. En effet, la plupart des mègevans ont oublié d’où vient l’illustre biquette, mais ils aimaient raconter qu’un troupeau de bisons broutait paisiblement à l’ombre du mont Joly, comme jadis dans les prairies européennes. Comme Dominique, les mègevans sont en deuil… en deuil d’un de leurs symboles.

1 comment
Laisser un commentaire

Inscrivez-vous !

Toute l'actualité de Megève et sa région directement dans votre boîte mail

You May Also Like

On bétonne le square de la baronne

Ce n’était donc pas une « Fake News », ni une « rumeur » ! Un projet d’aménagement est bel et bien prévu sur le square de la baronne de Rothschild, un des derniers espaces de respiration au centre-ville de Megève. Lors de la campagne électorale de mars 2020, les élus avaient pourtant démenti son existence…

Megève cède 42 millions d’€ de patrimoine… et achète une cave

En 6 ans, la municipalité a cédé quelques bijoux de famille (Domaine Skiable, Vériaz, terrain du Paddock) et a tenté d’acheter quelques propriétés… dont une cave dans l’ancien hôtel La Prairie. Cave qu’elle fait passer pour un appartement.

Un immeuble Square de la Baronne à Megève : fake news ?

Lors de la réunion organisée par la liste Notre Parti c’est Megève, le 8…