Mars 1950. Le chalet Les Bambinos, renommé depuis Les Portes de Megève, s’apprête à accueillir des petits parisiens du Cours Privé Victor Hugo. C’est une première pour la famille Grange, propriétaire des lieux, qui recevait jusqu’à présent, à Praz sur Arly, des enfants atteints de tuberculose en partenariat avec la Croix Rouge Suisse. Constance Müller de Schongor, institutrice, M. Lorphelin, directeur de l’établissement à Paris, et son épouse, ont prévu de délocaliser la classe pendant 3 semaines afin de permettre aux enfants de respirer l’air pur des cimes. Ensemble, ils inventent, sans le savoir, la classe de neige.
À l’époque, pas de ski. Les élèves ont cours normalement et, après l’étude, s’ils ont été sages, ils peuvent faire de la luge ou des batailles de boules-de-neige.
L’âge d’or des classes de neige
C’est un succès. L’Éducation Nationale s’empare du concept et, dès 1953, valide l’organisation de tels séjours. Certaines villes investissent dans des centres de vacances dans les Alpes, à l’instar de La Ciotat, à Praz sur Arly. Ou de Malakoff, qui a fait construire un bâtiment à Megève, ou de Courbevoie, qui possède Les Bartavelles au mont d’Arbois. Les élèves alternent cours avec leurs enseignants et activités sportives encadrées par des moniteurs. Entre les années 1950 et 1990, des dizaines de milliers d’enfants découvrent les Alpes et attrapent le virus de la glisse. Ils deviennent les premiers clients des stations de ski.
Un concept en perte de vitesse
Aujourd’hui, les classes de neige ne font plus recette. France Montagne estime qu’il faut environ 70 € par enfant et par jour pour organiser un séjour à la montagne, nourriture, activités et transports compris. Si les villes et les départements ne donnent pas de subventions, la facture est trop salée pour les familles.
Les enseignants, eux, doivent faire face à l’augmentation des normes de sécurité ainsi qu’au durcissement des contraintes pédagogiques et administratives. Organiser une classe de neige est un véritable parcours du combattant. Par ailleurs, les centres d’autrefois ont vieilli, et les travaux de réhabilitation sont parfois prohibitifs.
Séduire les jeunes
Pourtant, ces classes de neige sont essentielles aux stations de ski. Elles leur permettent de créer un réservoir de clientèle.
La proportion des skieurs de 15-25 ans est passée de 20 % en 1995 à 14 % aujourd’hui, selon une étude de l’Association des Maires des Stations de Montagne parue en janvier. Et si la solution était finalement plus proche ? Et si le futur de la classe de neige consistait simplement à éduquer aux joies de la glisse les personnes résidant dans un rayon de 30 à 40 km. En effet, combien d’enfants de la vallée de l’Arve ont-ils déjà skié ? En 2019, la Région Rhône-Alpes a lancé un Plan Montagne pour mettre davantage de jeunes sur les skis. Elle prend désormais en charge le transport vers les pistes. Des subventions sont aussi prévues pour rénover les centres de vacances.
Des initiatives cependant suspendues à la présence de la neige… qui se raréfie à cause du réchauffement climatique…